Cuisine Aveyronnaise de nos Bastides du Rouergue
Durant huit semaines, de juillet à fin août,
Nous allons feuilleter dans l’hebdomadaire : le Villefranchois la Gazette du Quercy-Rouergue, le livre de notre cuisine rouergate et plus particulièrement de notre bastide villefranchoise.
Nous ne célébrerons pas les plats phares, universellement connus : l’aligot, la truffade, les tripoux, le gâteau à la broche … que vous rencontrerez tout l’été sur les marchés gourmands.
Nous essaierons de retrouver, de dépoussiérer ou de découvrir, ces préparations “à la fortune du pot″, avec des produits d’ici, cuisine familiale simple et de bon sens, avec une âme et beaucoup d’amour : nos racines gourmandes.
Ces petites émotions simples, ces moments de l’enfance, partagés un jour et peut être oubliés…
Une autre façon de parler de notre culture et de notre patrimoine.
Tripade à l’oseille
Pour commencer cette série “Cuisine de notre Rouergue″, je souhaitais vous présenter un “tôt-fait″, facile à réaliser : la “Tripade à l’oseille″. Patrimoine de la ménagère d’ici, un plat à préparer toute l’année, parfait pour les jours où l’on ne veut pas se prendre la tête.
Chacune (ou chacun) a sa méthode et son tour de main, mais les ingrédients ne changent pas. Nulle charcuterie, tripes et autres abats comme pourrait le laisser entendre cette appellation “tripière″.
Pour 4 personnes prévoyez :
500 g d’oseille en feuilles,
6 grosses pommes de terre,
4 œufs et de la graisse de canard (surtout !).
Cette recette colle à mon enfance, au Relais de Farrou. Maman Marcelle la préparait à la perfection. En garniture d’une cuisse ou d’un manchon de canard confit, à la peau bien dorée et croustillante. Un plat gouteux et dégourdi : l’acidité de l’oseille atténuée par les pommes de terre, facilite la digestion du confit à la graisse généreuse. De la gourmandise et du plaisir simple.
Chacun a sa méthode et son tour de main
Allez en cuisine !
Tailler les pommes de terre épluchées, en rondelles ou en morceaux réguliers et assaisonner. Les sauter à la poêle dans de la graisse de canard. Lorsque les pommes de terre sont cuites et commencent à blondir, égoutter la graisse en excédant. Ceci est le point de départ, commun à tous.
A ce moment, certains ajoutent directement dans la poêle, l’oseille crue en feuilles (non hachées !) puis 2 œufs cuits durs, coupés en rondelles. Le tout mijotera ensemble quelques minutes. Avant d’ajouter au dernier moment, les 2 œufs restants assaisonnés et battus avec un peu de lait. Laisser cuire à feu doux environ 3 mn en mélangeant délicatement. Servir bien chaud.
La méthode est rapide. Le résultat bon et généreux explique en partie l’appellation peu flatteuse de “Tripade″ dont nul ne peut justifier l’origine sinon au prix de divagations éclairées de fin de repas. A chacun sa petite histoire!
Je préfère une présentation plus structurée, avec les pommes de terre sautées, bien dorées et fondantes, d’un côté et l’oseille en “Tripade″ préparée à part.
Prendre soin au préalable de cuire 2 œufs durs, les écaler, séparer le jaune du blanc, passer ensuite séparément au tamis le jaune et le blanc. Réserver.
Faner rapidement, dans quelques cuillères de graisse de canard, les feuilles d’oseille, triées, équeutées, lavées, égouttées. Assaisonner dès le départ. Verser petit à petit quelques cuillerées de bouillon chaud, de volaille ou de légumes, en remuant délicatement, pour emmener à une consistance souple et onctueuse.
Ajouter deux œufs à cru, assaisonnés. Brouiller légèrement du bout de la cuillère en bois, à feu doux. Des filaments blancs et jaunes apparaîtront mêlés à l’oseille, rappelant la “Tripade″ originale.
Dressage :
Répartir la “Tripade″ sur le fond d’un plat de service ou d’une assiette. Parsemer dessus le blanc et le jaune d’œufs réservés. Disposer harmonieusement les pommes sautées. Déguster sans attendre.
(Si vous souhaitez ajouter un morceau de canard confit, voici une petite astuce. Maman dorait à la graisse de canard une tranche de pain de campagne rassis, d’1 cm d’épaisseur ; elle la disposait sous chaque confit pour avoir un peu de croustillant et rehausser la volaille).
Pour vous rappeler l’Aveyron, vous pourrez servir la “Tripade″ avec un poisson blanc, du saumon, un rôti de porc, de volaille ou de lapin…
L’oseille et ses vertus : un légume à découvrir
Avant, il y avait toujours de l’oseille au jardin, à la campagne ; un légume très souvent employé… dans des soupes, sauces, omelette, purées… mais aussi pour ses propriétés dépuratives, digestives et astringentes. Les Romains l’utilisaient pour alléger leur cuisine parfois un peu trop riche et se servaient des tiges et des feuilles comme présure pour cailler le lait.
Préférez l’oseille ronde ou petite oseille d’un vert plus tendre à l’acidité moins marquée. Il est bon de savoir qu’un pied d’oseille planté à l’ombre fournira des feuilles moins acides qu’un plant exposé au soleil.
Sur nos marchés de mai à octobre, d’une conservation fragile, procédez ainsi pour en avoir sous la main tout au long de l’année. Si vous ne pouvez cuisiner les feuilles immédiatement, les trier, équeuter, laver, égoutter et faites-les cuire, (juste fanées dans une casserole avec une cuillère de graisse de canard). Vous pourrez la conserver ainsi, 2 ou 3 jours au frigo ou au congélateur.
Astuce :
Pour ceux qui n’aiment pas les arêtes qu’ils se réjouissent, on attribue aux feuilles d’oseille le pouvoir de faire fondre, à la cuisson, les arêtes les plus sournoises des poissons. Elle soulage le foie et l’estomac, seul bémol, à déconseiller à ceux qui souffrent de la goutte, de calculs aux reins, aux arthritiques et aux rhumatisants. Vous en saurez un peu plus sur ce légume si méritant.
Francis Cardaillac 07 – 07 – 2015